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  • Darwin et la fraternité

    En ce moment, on voit partout le portrait de cet homme grisonnant et barbu, qui a l’air si calme et tranquille : en effet,  on fête le bicentenaire de la naissance de Charles Darwin, né en 1809 et aussi le 150ème anniversaire de la parution de son livre majeur, « De l’origine des espèce », en 1859.  On s’étonne presque, devant son apparente bonhommie, que ses écrits aient pu déclencher une telle fureur de protestations, de passion, de sarcasmes, de débats.  Il ne faut pas oublier que Darwin est un personnage du XIXème siècle, et qu’on ne peut comprendre ses travaux, et les réactions qu’ils ont suscités, qu’à la lumière de son temps.

    Le XIXème siècle est dominé par l’idée de progrès, l’idée que tout ira de mieux en mieux (idée renforcée les progrès dans le domaine économique) et c’est dans ce contexte culturel qu’est née la théorie de l’évolution des espèces. Charles Darwin n’en est pas l’inventeur; on sait qu’il a lu l’œuvre du géologue Charles Lyell qui proposait une explication évolutive des phénomènes naturels et les travaux du naturaliste français Jean-Baptiste Lamarck, pour qui le temps produisait la transformation progressive des espèces. La nouveauté proposée par Charles Darwin porte sur le moteur qui est à la base de l’évolution, répondant ainsi à la question : qu’est ce qui fait que l’évolution pousse les espèces à évoluer dans tel sens plutôt que dans tel autre ? A cette question Darwin répond : la « sélection naturelle ». Là encore, il n’est pas tout à fait le premier, car son jeune collègue Alfred Wallace était sur le point de publier des conclusions assez voisines (pour la petite histoire, on peut noter la grande honnêteté  de Darwin qui, alors même que Wallace était absent en raison d’un voyage en Malaisie, a reconnu la contribution de Wallace lors d’une lecture conjointe de leurs travaux). Darwin est une personne très prudente, et s’il publie ses conclusions en 1859, c’est après une série impressionnante de travaux sur le terrain, en particulier en se basant sur des observations qu’il a réalisées aux îles Galapagos lors d’un voyage sur le Beagle, un vaisseau chargé de relevés hydrographiques, au bord duquel il était monté en 1831 alors qu’il venait d’achever ses études de théologie. Au cours de ce long voyage, Darwin a pu étudier les légères variations qui peuvent exister au sein d’une espèce sur des îles voisines. L’idée centrale est qu’il existe deux phénomènes indépendants : d’une part la variabilité (le fait qu’au sein d’une population, les sujets peuvent être très différents les uns des autres) et d’autre part les conditions de l’environnement favorisant la reproduction des mieux adaptés à ces conditions particulières. Ainsi, s’il fait très froid, cela va favoriser la reproduction des animaux avec le plus de fourrure. Cependant, en raison de la variabilité, il restera toujours au sein de la population des animaux avec moins de fourrure, et ces derniers seront plus adaptés que les premiers si le climat se réchauffe. Ainsi, la présence des individus les moins « adaptés » est un bienfait pour la population, puisqu’elle permet son adaptation si les conditions de l’environnement changent : les plus faibles deviennent ainsi un atout sur le long terme. En plus, d’autres traits que le fourrure participent aussi à l’adaptation d’un individu, si bien qu’il se pourrait qu’un individu avec peu de fourrure possède par ailleurs une caractéristique favorable à son adaptation, comme un bon système immunitaire. Cette théorie de la sélection naturelle a été assimilée à tort à la théorie de la « survie du plus apte ». Or, il s’agit là d’une erreur d’interprétation, puisque, comme on vient de le voir, la sélection porte sur une population (un groupe d’individus, combinant plusieurs traits de variation) et non sur des individus eux mêmes.

    Cette théorie de l’évolution par sélection naturelle  a été à l’origine de bien des interprétations idéologiques, en particulier lorsque certains ont tenté d’adapter ses conclusions à l’espèce humaine. On peut évoquer le « darwinisme social »,  prôné par Herbert Spencer, penseur libéral qui défendait l’idée d’une concurrence sans règles ni limites : selon lui, puisque les individus les moins bien adaptés sont destinés à être éliminés par l’évolution, autant ne leur proposer aucun soutien. Des idées voisines étaient défendues par l’économiste Thomas Robert Malthus qui pensait qu’il ne fallait fournir aucune aide aux plus pauvres, ou par Francis Galton qui partait de ce principe pour proposer l’exclusion des plus faibles des fonctions de reproduction, ce qui correspond à l’eugénisme. Darwin n’adhérait en rien à ces interprétations qui allaient bien au-delà de sa théorie, comme en témoigne le fait que pendant 40 ans il a consacré une bonne partie de son temps à aider les plus démunis.

    Il faut noter aussi que Darwin a construit sa théorie de l’évolution par sélection naturelle en se basant sur ses observations faites aux îles Galapagos, un environnement caractérisé par une végétation luxuriante et une forte densité de la faune. Peu de temps après, un autre naturaliste, le russe Pierre Kropotkine, qui menait ses travaux dans les plaines semi-désertiques de Sibérie, proposait dans son livre « L’entraide, un facteur de l’évolution » paru en 1902 un autre moteur à l’évolution des espèces : l’entraide. En effet, dans les zones de faible densité dans lesquelles il menait ses travaux, la situation n’était pas celle d’une compétition acharnée entre individus et entre espèces, et la coopération et l’aide réciproque  apparaissent donc comme un moteur de l’évolution.

    Ainsi, la théorie de l’évolution porte en elle des idées très positives, et si un malaise a parfois pu s’installer, cela est essentiellement lié à des interprétations outrancières et idéologiquement marquées. Darwin est le fruit d’un dialogue avec d’autres penseurs de son temps, et ses idées sont loin d’aller à l’encontre d’idéaux de fraternité et de solidarité, comme certains ont pu le postuler.

  • Travailler le dimanche?

    Ce qui me choque le plus dans cette proposition de travail le dimanche, c'est la réaction de ceux qui se réjouissent de la possibilité d'en profiter pour faire leurs courses. Mais les gens n'ont-ils rien à faire d'autre que de consommer? Ils donnent l'impression de n'avoir pas d'autre idéal. Ont-ils oublié qu'on peut aussi passer son temps en se promenant dans la nature, en lisant, en visitant les malades ou les personnes âgées, en rendant service à une personne démunie, en faisant du bénévolat? La société de consommation prendra-t-elle le devant de la scène, avant la fraternité?

  • Voyage africain (suite)

    Et là, nous retrouvons l'ambiance des grandes villes africaines. Nous sommes au bord de l'océan, le climat ici est difficile à supporter en raison de la moiteur de l'air.. On peut bien sûr se rafraîchir à l'aide des ventilateurs présents dans la maison, mais les coupures de courant sont fréquentes. Les plus riches ont un groupe électrogène, les autres attendent dans cette atmosphère saturée en humidité. Au loin, on entend des coups de tonnerre. Sans doute l'arrivée prochaine de la saison des pluies. Le lendemain, nous nous reposons: ballade en zem, déjeuner dans un restaurant au bord de la plage, courses. Le surlendemain, visite de notre projet au Bénin: un centre de formation pour adultes. Notre interlocuteur, Idrissou, est un jeune béninois, créateur d'une entreprise rentable, qui a tout laissé pour s'occuper d'action humanitaire auprès des siens. En discutant avec lui, je suis une nouvelle fois emmerveillée par ces jeunes africians qui se mettent au service des leurs. Après Iaovi et Alfred, c'est le troisième que nous rencontrons en une semaine. Avec des hommes de cette trempe, il y a beaucoup d'espoir pour ce continent! Mais l'heure avance, il nous faut rejoindre Lomé pour prendre l'avion qui nous ramène en France. Bref voyage, mais que d'enseignements et de souvenirs!