Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Fraternité - Page 2

  • La FIV à 3.. une fausse bonne idée?

     

    Les députés britanniques viennent de se prononcer en faveur de l’utilisation de la fécondation in vitro (FIV) avec remplacement mitochondrial, parfois appelée « FIV à trois parents ». De quoi s’agit-il au juste? Dans les gamètes humains (ovules et spermatozoïdes), l’essentiel de l’ADN est localisé dans le noyau des cellules (20 000 gènes), mais une petite partie (37 gènes) se trouve dans les  mitochondries. Au moment de la fécondation, l’ADN mitochondrial des spermatozoïdes est systématiquement perdu, si bien que l’embryon se développe à partir de l’information génétique contenue dans l’ADN nucléaire de son père et de sa mère, mais aussi dans l’ADN mitochondrial provenant uniquement de sa mère, qui est donc hérité de façon strictement matrilinéaire. Dans certains cas, cet ADN mitochondrial peut véhiculer des maladies graves comme par exemple la maladie de Leigh. L’idée de la FIV à 3 parents est donc de créer des embryons dans lesquels l’ADN mitochondrial défectueux pourrait être remplacé par l’ADN mitochondrial d’un donneur. Cet embryon sera donc constitué de trois types d’ADN : l’ADN nucléaire de ses deux parents, et l’ADN mitochondrial d’un donneur.

     

    Pour beaucoup, une fois que cette méthode aura prouvé sa faisabilité (ce qui n’est pas attesté pour l’instant car elle n’a été testée que chez l’animal), elle ne poserait pas de problème éthique particulier, car on ne toucherait pas à la transmission du patrimoine génétique : l’apport du donneur ne correspondrait à rien de plus que « changer une pile » défectueuse. En effet, souvent la mitochondrie est décrite comme étant la «batterie de la cellule ». En réalité, comme souvent avec les analogies, cette métaphore est trompeuse et nous égare. Tout d’abord, en biologie la quantité n’est jamais ce qui importe le plus : autrement dit, ce n’est pas parce qu‘une chose est abondante qu’elle est importante, et vice versa. Pensons aux cellules de la rétine : elles ne sont pas nombreuses comparées au reste des cellules du corps, mais comme elles ont une fonction cruciale pour voir, elles sont essentielles. De la même manière, ce n’est pas parce qu’il n’y a que 37 gènes mitochondriaux qu’ils ne sont pas importants. En second lieu, les défenseurs de la FIV à 3 ignorent un phénomène très important : les interactions des gènes entre eux. En effet, les gènes n’agissent pas isolément, mais collectivement, au sein de réseaux : ainsi l’ADN mitochondrial interagit avec l’ADN du noyau, si bien que les 37 gènes mitochondriaux modifient l’expression des gènes nucléaires grâce à un genre de dialogue constant. La preuve : des études scientifiques ont démontré une implication de l’ADN mitochondrial dans les aptitudes cognitives, le vieillissement ou encore les traits de personnalité comme l’extraversion par exemple.

     

    Quelle leçon en tirer ? Peut être que les débats éthiques, en plus de s’appuyer sur des principes moraux,  doivent  aussi tenir compte de la complexité du biologique, car l’ignorer pour la réduire à des processus simplifiés peut conduire à des conclusions peu fondées. Bien d’autres exemples pourraient illustrer cette thèse.

  • Que révèle le slogan "Je suis Charlie" de ce que nous sommes?

    Ce qui me frappe le plus dans les formules qui ont presque spontanément envahi l’espace public suite aux terribles évènements de ce mois de janvier, c’est … leur point commun ! En effet, à la fois le très répandu slogan « Je suis Charlie », sa traduction dans d’autres langues,  les autres expressions dirigées contre les actes terroristes (« Je suis avec Charlie » mais aussi « Je suis nigérian ») ou même les anti-slogans (« Je ne suis pas Charlie », voire même le « Je suis .. » associé au nom de l’un des terroristes) partagent le fait d’être formulés à la première personne du singulier. Voilà qui contraste avec le « Nous sommes tous américains »  énoncé par Jean Marie Colombani suite aux attentats du 11 septembre 2001, ou d’autres « Nous » apparus dans le contexte de la seconde guerre mondiale.  Car un ensemble de « je » n’a pas grand chose à voir avec un « nous ». Comme si nous ne formions plus vraiment un peuple, un ensemble de personnes capables d’exprimer collectivement son horreur. Bien sûr il y a eu les impressionnantes manifestations qui ont vu défiler des millions de personnes exprimant leur horreur dans le respect de la diversité, témoignant d’une forme de réaction collective. Bien sûr aussi, cette apparition sur le devant de la scène du « Je » peut être lié au mode de propagation de ce slogan (essentiellement via les réseaux sociaux). Même si l’explication résidait là, cela pourrait signifier aussi que ces réseaux favorisent l’expression d’un « ensemble de je », ce qui est bien différent d’un « nous »..

    On pourra rétorquer qu’il y a un précédant, et évoquer le « Ich bin ein Berliner »  de John Fitzgerald Kennedy en visite à Berlin en 1963, mais le président américain faisait allusion à une citation en latin (Civis romanus sum, "je suis un citoyen romain"), ce qui est bien différent du contexte dans lequel est apparu le « Je suis Charlie ».

    Les nuances sémantiques ne sont jamais insignifiantes ou innocentes. Les choix linguistiques exercent toujours une fonction de révélateur de ce qui déjà existe, sur un mode souvent implicite. Pour résoudre un problème, une première étape est d’en prendre conscience. Voilà peut être une occasion, en partant de ce constat,  qui nous est donnée d’aller plus loin en essayant de promouvoir, à l’aide des médias et de l’éducation, cette conscience de former un peuple uni par notre triade républicaine.

  • La générosité, un avantage évolutif?

    Souvent, on présente la générosité ou l'entraide comme un acte purement gratuit, voire désavantageux pour celui qui le produit.. On se demande alors comment une telle qualité aurait pu être sélectionnée par l'évolution des espèces, qui postule que seuls les traites avantageux sont sélectionnés et conservés d'une génération à l'autre.. La question est ancienne, et déjà au XIXème siècle le biologiste russe Kropotkine avait proposé que l'entraide pourrait être favorable à la survie des espèces, et donc servir de moteur à l'évolution. trois études récentes (parues dans des journaux scientifiques réputés le 1er août pour l'une, le 19 août pour la seconde et le 2 septembre pour la troisième) sont venues confirmer cette idée. Elles montrent, en s'appuyant sur des données obtenues dans de grandes sociétés animales et sur des modèles mathématiques solides, que l'altruisme, l'entraide, la coopération et le pardon ont un effet bénéfique à long terme pour celui qui le produit.. car ces comportements vont, au final, susciter l'imitation et la réciprocité.. une raison de plus pour tendre la main et être fraternels!